1537. Dans le Haut-Jura, une course poursuite s’engage entre plusieurs personnages. Apparemment, le crime des fuyards serait de ne pas être de bons chrétiens. Les apparences sont trompeuses. Le motif du » crime » est tout autre et les poursuivants ne sont pas là que pour faire régner la loi du Bon Dieu.
Comme l’a montré la « bande-annonce« , Le Maître d’Armes n’est pas qu’un récit historique classique. Si Xavier Dorison reprend un retournement de situation classique (le chasseur devient victime), il utilise toute la science de la narration pour nous plonger dans un récit épique, barbare où science, religion, art d’escrime, voire deux époques (le Moyen-Âge, la Renaissance). Au fil du récit, les personnages prennent de l’ampleur, combattent pour ce qui leur est cher. Un but qui peut nous paraître désuet à nous, lecteurs du XXIème siècle. C’est justement cette distance (XIVème-XXIème siècle) qui est intéressante. Alors que notre monde actuel est secoué par des extrémistes, comment se comportait nos ancêtres ? Pour l’assise d’un pouvoir, d’une religion, voire d’une situation (le fameux titre du livre), ils étaient prêts à toutes les extrêmités. Quand on lit la fin du récit (qui peut se comparer à l’histoire), le lecteur se dit : A quoi ça sert ?
Car à l’inverse de récits chevaleresques, Le Maître d’Armes est un livre pessimiste. Les personnages s’abaissent dans une sauvagerie totale où la clé est la survie. Dans cette chasse à l’homme, on peut y voir des références à Rambo (retournement de situation, on prend les armes qu’on peut, quel est celui qui a le « bon » droit, etc.). C’est aussi une époque où deux classes d’armes s’affrontent : l’épée (école germanique) et la rapière (école italienne). Si Xavier Dorison effleure le sujet, il aurait été intéressant d’avoir une suite (pourquoi la rapière, les avantages de la porter, etc), car historiquement, il y a un changement aussi bien social que technique avec l’arrivée de cette lame.
Pour incarner le « héros » du titre, les auteurs mettent en scène un homme âgé, qui semble n’être plus que l’ombre de lui-même, mais celui-ci se reprend et redevient un expert en armes. Pour incarner ce changement, aussi brusque que fatal, nous avons un gros plan sur les yeux…Avant que le massacre ne commence. Une séquence qui se répète plusieurs fois et qui fait penser aux berserkers (guerriers qui sous le coup de la fureur devenaient « invincibles »).
Joël Parnotte n’est pas en reste. Sur la totalité des personnages, peu ont un visage angélique. Nous avons plutôt des « gueules ». Loin des salons, en plein hiver, ils sont habillés avec du tissu grossier. Ils ressemblent plus à des paysans qu’à des guerriers, mais ne vous y trompez pas, tous sont redoutables. Son jeu de mise en scène (cadrage, insert, lecture) n’est pas loin du cinéma. Claire, précise, elle permet au lecteur d’embrasser la case d’un seul coup d’oeil. Quant aux couleurs, la teinte générale choisie est originale : bleu. Dans cet endroit du Jura, en pleine nuit, c’est un bleu glacial, qui vous prend aux tripes, mais on peut rappeler aussi que le bleu est la couleur du roi, comme celle de la vierge (une coïncidence entre la couleur et les thématiques?)
Mélangeant histoire et « survival » Xavier Dorison et Joël Parnotte nous invitent à une double lecture : le plaisir de la bande dessinée mais aussi une réflexion sur l’art du combat et sur cette période charnière Moyen-Âge/Renaissance.
LE MAÎTRE D’ARMES
AUTEUR : XAVIER DORISON
DESSINATEUR : JOËL PARNOTTE
EDITIONS : DARGAUD
Cette chronique a été publié pour la bd de la semaine, aujourd’hui hébergée chez Alias Noukette. Retrouvez-y les autres chroniques bandes dessinées.
Pas trop envie de ce genre de BD… Tu me pardonnes ? 🙂
Je ne sais pas…. Je te laisse dans l’expectative 🙂
Pas ma tasse de thé non plus, même si tu la vends bien 😉
Merci pour la vente…. Sinon, on lit tous des choses différentes, c’est ce qui fait notre force
Je te lis pas trop car je compte l’acheter et le chroniquer . Je n’ai aucun doute sur mon plaisir de lecture …
Ah, je m’étais pourtant dit que je n’allais pas lire ta chronique avant de rédiger la mienne… tant pis !!!
Tu l’expliques et le vends très bien (même si j’étais déjà conquis)
Merci M’sieur !
Merci à toi !
Je suis comme Stephie et Noukette, ce n’est pas trop mon genre. Mais je reconnais que Dorison est un scénariste exceptionnel.
J’en profite pour te souhaiter une bonne fête !
Ce genre de BD ne me tente pas plus que ça.
pas ma tasse de thé, je crois…
Je n’aime pas trop les scènes de bataille. Quand j’entends Maître d’armes, je pense tout de suite à celui dans la série de Kamelot, j’adore. Mais ça n’a rien à voir avec ta BD 🙂
Ah, mais justement, il n’y a pas que des batailles.
Je ne sais pas si c’est mon genre… mais bon, je suis pas mal « je lis n’importe quoi » alors si je tombe dessus, why not! Tu le vends super bien, par contre!
Karine, comment dois-je prendre « je lis n’importe quoi ». ? Mais merci du compliment !
Je ne suis pas friande de ce genre d’histoire mais ton billet fait tout de même envie. Why not!
J’annonce, je vais enfoncer le clou posé par hervé. C’est Lundi que ça se passe!
Cet album est juste un des meilleurs de l’année. S’arrêter à l’aspect baston serait une GRAVE erreur qu’il ne faut pas commettre, mesdames, il y a beaucoup plus à prendre dans ces pages.
Lundi, je vous dis! ^^
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